L'entaillage des érables revu et corrigé

L'ENTAILLAGE DES ÉRABLES REVU ET CORRIGÉ

Un texte d'Étienne Gosselin, Agronome, M. S.C.

Ce n’est pas seulement un bon entaillage qui garantira de bons rendements sucriers. En entaillant correctement et avec les outils adéquats, on laisse moins de place au hasard. Keven Lefebvre, acériculteur et expert en entaillage, fait partager son savoir.

Science ou art, l’entaillage ? Ce n’est pas le genre de question que se pose Keven Lefebvre, concepteur et distributeur des mèches spécialisées de marque Bolduc1. L’homme entaille à longueur d’année : il fait provision de bûches d’érable, qu’il fait geler dans un congélateur pour tester et retester les mèches que sa conjointe, Cindy Paquet, et lui dessinent et font fabriquer selon leurs spécifications. Dans leur atelier, qui leur fait office de laboratoire, ils perfectionnent sans cesse ces bouts de métal torsadé si utiles pour percer l’écorce et l’aubier des érables. Le micromètre est leur outil de prédilection.

On n’entaille pas les érables avec de vulgaires mèches d’ébénisterie qui percent le bois sec. La mèche à entailler se distingue par ses goujures (qui évacuent rapidement les copeaux générés par la coupe, sans besoin de va-et-vient qui égueule le bord de l’orifice), par un angle d’hélice prononcé (pour accélérer la coupe) et par une pointe acérée (capable de percer les fibres du bois vert, gelé ou pas). L’objectif : obtenir un trou bien rond et sans poils (fibres), afin d’éviter les fuites de vide d’un chalumeau qui n’épouse pas parfaitement l’orifice.

« Le métal de la mèche est de grande qualité, pour éviter de brûler aussi bien le bois que la mèche, surtout avec les perceuses à haute vitesse », explique Keven Lefebvre. Une mèche aura une durée de vie utile de 1000 à 1500 entailles, après quoi un affûtage unique est nécessaire (coût : cinq dollars). La pointe de la mèche fait l’objet d’un aiguisage spécial dit « en pointe séparée », qui permet un meilleur mordant à l’attaque de l’écorce.

Les mèches, qui se vendent environ 23 $ chacune, sont proposées en six diamètres, celles de 19/64 po et de 5/16 po faisant les plus grosses ventes. Le diamètre de 7/16 po reste encore populaire dans les érablières où l’on récolte au seau. La tendance est à la diminution du diamètre, pour favoriser la cicatrisation de l’entaille.

Nouveauté : Les Mèches Bolduc offrent des forets plus courts. Ainsi, même avec une mèche enfoncée au complet dans l’arbre, l’entaille ne dépasse pas 2 po – un avantage certain, car les organismes de certification biologique vérifient la profondeur d’entaillage, idéalement comprise entre 1 ½ et 2 po, selon le diamètre de l’arbre.

UN DÉFI DE TAILLE

Keven Lefebvre recommande aux propriétaires d’érablières moyennes de garder au moins cinq mèches en stock, car maintenir ses mèches bien aiguisées est un défi de taille. Un foret tranchant épuise moins les batteries des perceuses et…l’entailleur!

Première règle: retirer la mèche du mandrin et la placer dans un étui durant le transport. Ensuite, lors de l’entaillage, éviter de cogner le foret avec le marteau lorsqu’on range celui-ci dans une poche du tablier.

Dernier conseil de Keven Lefebvre : nettoyer deux fois par jour les mèches avec un produit à la fois désinfectant et lubrifiant, de qualité alimentaire, ce qui diminue les risques de friction causée par les débris collants. Étendre ce produit sur un linge doux et l’appliquer sur la mèche en tournant. « L’alcool isopropylique pur assèche le métal et dégrade le fini lustré », explique l’acériculteur, qui teste toujours ses forets et ses autres produits dans l’érablière où son père et lui pratiquent chaque année, en décembre, 40 000 entailles. Un deuxième laboratoire – à ciel ouvert celui-là – pour parfaire la science de l’entaillage… ou l’art, c’est selon !

Pour plus d’informations, consultez votre marchand Agrizone ou communiquez avec notre service technique par téléphone (sans frais) au 1-800-361-0885 poste 2389 ou par courriel.

1Les Mèches Bolduc, entreprise de Saint-Théophile (Chaudière- Appalaches), effectue 80 % de ses ventes au Québec, où elle détient 90 % du marché. L’entreprise propose un désinfectant- lubrifiant pour mèches, conçu pour nettoyer et nourrir le métal mieux que l’alcool isopropylique pur. Ce produit contient de l’huile de paraffine et de lanoline, outre de l’alcool et de l’eau. Les Mèches Bolduc testent toujours leurs produits dans une érablière commerciale un an avant leur lancement.